Gastronomie : l'institut Lyfe et Apicil défendent "les repas en famille"
Jeu 1 Juin - 15:15
Les repas en famille… ou comment allier impératifs temporels, diététiques et goûts individuels*. Le Groupe #APICIL et le Centre de recherche de l’Institut #Lyfe (anciennement Institut Paul #Bocuse) publient les résultats d’une étude doctorale « A table en famille » menée par Fairley Le Moal en collaboration avec l’Université Lyon 2 (Centre Max-Weber), l’Université Flinders et soutenue par l’entreprise Mars Food.
Un repas, seul moment de la journée parfois où toute la famille est réunie, peut générer de fortes émotions, des fous rires ou des déceptions... avec son lot « d’invités surprises » que sont la télé, les jouets, les soucis, une viande brûlée ou une assiette cassée. Comment se déroulent concrètement ces repas en famille et quels en sont les enjeux ? Tel est l’objet de la thèse de Fairley Le Moal (Université Lyon 2, Université Flinders, Mars Food) que le Groupe APICIL, 3ème groupe de protection sociale, publie avec le Centre de recherche de l’Institut Lyfe. Les travaux sont issuss d’entretiens et observations menés au sein de foyers en France et en Australie. Ils montrent la complexité de la question du lien social lors des repas compte tenu de la diversité des attentes des acteurs en présence (enfants, père et mère), des contraintes temporelles et logistiques, de la multiplicité des contextes, influences culturelles et socio-économiques.
« Manger n’est pas qu’un besoin physiologique, c’est aussi l’occasion de remplir des objectifs, le premier étant que le repas se passe bien, ensuite c’est une opportunité de partager un moment de plaisir et de connivence, de raconter ses expériences du jour, d’avaler son repas assis, de prendre le temps de mâcher pour bien digérer ; mais aussi de manger équilibré ou d’être reconnu(e) pour ses qualités en cuisine, décoration, invention. Les conclusions de la thèse de Fairley Le Moal montrent combien les repas en famille demeurent remarquablement ancrés au sein des familles observées. » souligne Alexandra Caringi, Directrice Action Sociale & Services de Suivi Médical Métier Santé-Prévoyance d’APICIL.
Parmi les principaux enseignements observés par Fairley Le Moal : la commensalité ou l’art de manger ensemble
Le concept de commensalité désigne le fait de manger ensemble, illustrant ainsi l’intrication courante chez l’humain des deux pratiques essentielles que sont l’acte de s’alimenter et la sociabilité. En France, la commensalité est souvent au cœur du quotidien des familles. Les repas rythment la vie de tous les jours, tout autant que la vie quotidienne les façonne en retour, et ils constituent un temps de partage important lors duquel peut se faire l’apprentissage des règles sociales. La commensalité quotidienne est aussi à envisager d’un point de vue sanitaire. Les repas de famille sont, en effet, souvent perçus comme un moment d’éducation au goût et à une alimentation saine et variée. Ils sont, en outre, régulièrement promus par les autorités de santé publique en matière de santé physique, mentale, de bien-être et de sociabilité.
Le casse-tête de l’organisation des repas
La préparation des repas relève souvent du casse-tête tant sont nombreux les paramètres à prendre en compte :
- Les contraintes temporelles : l’importance accordée aux repas de famille s’inscrit dans une considération plus large pour la bonne santé des enfants, dont l’un des facteurs essentiels est le sommeil. L’impératif de coucher les enfants à une heure régulière et pas trop tard détermine, en effet, la durée et la fin des repas de famille. Les engagements de chacun dans la vie sociale en dehors de la maison sont également pris en compte.
- L’impératif diététique : les repas doivent être équilibrés, différer des repas pris le midi à la cantine scolaire et varier avec les dîners des autres soirs de la semaine, mais aussi d’une semaine à l’autre. Certaines familles utilisent des stratégies d’anticipation, en décidant à l’avance du menu pour s’alléger des contraintes alimentaires au jour le jour et faciliter la participation des pères. D’autres, à l’inverse, préfèrent simplifier les menus, ce qui en réduit souvent la qualité diététique au prix notamment de l’exclusion de certains légumes, car trop longs à préparer.
- Les préférences individuelles et le respect des restrictions alimentaires des différents membres de la famille dictent aussi la production des repas, c’est un facteur qui peut très vite devenir source de stress. A noter que l’étude relève que la perception de la viande rouge a évolué, une grande partie des familles observées essayant d’en limiter sa consommation lors des dîners.
La préparation des repas : un fardeau pour les mères, un plaisir pour les pères
Toutes les mères interrogées dans le cadre de l’étude ont indiqué être en charge des questions alimentaires dans le foyer et exprimé des sentiments de contrainte, de lassitude, de stress ou de culpabilité. En effet, elles s’attèlent à trouver les menus pour la semaine en prenant en compte les impératifs de santé et les préférences individuelles de chacun, les courses à réaliser, et l’heure du repas. À cette charge mentale s’ajoutent des dimensions morales et émotionnelles, notamment la responsabilité de devoir bien nourrir la famille, afin d’être une « bonne » mère et de témoigner ainsi son amour maternel. Les pères interrogés, quant à eux, ont un rapport épicurien à la nourriture et à la cuisine. Ils vivent le temps de préparation des repas comme un temps de détente permettant de déconnecter du travail et de transitionner vers la vie domestique.
Une nécessité physiologique et un enjeu de santé
Le repas doit répondre au besoin physiologique fondamental et universel que constitue la consommation alimentaire. Or, une personne n’aura pas forcément faim en même temps qu’une autre. Manger ensemble implique cependant de synchroniser les rythmes alimentaires des différents membres de la famille, ce qui contrarie parfois les besoins individuels. Pour les enfants, le temps du repas est aussi synonyme de découvertes gustatives. Néanmoins, les familles étudiées ont des conceptions bien différentes concernant le processus d’acquisition du goût. Celles de la classe moyenne inférieure considèrent que les enfants apprendront à aimer des goûts diversifiés lorsqu’ils seront plus âgés, voire adultes. En revanche, les familles de classes moyenne haute et supérieure pensent que les enfants sont susceptibles d’être socialisés tôt à des goûts d’adultes estimés comme sains.
Un temps de retrouvailles primordial pour « faire famille »
Le temps passé à table est aussi un moment pour échanger, et c’est même l’un des piliers de la commensalité en France. Le repas est un temps important pour la cohésion de la famille dans la mesure où les conversations permettent de générer un sentiment d’appartenance, de s’impliquer dans la vie des uns et des autres, et de créer une représentation commune du monde. Des conversations qui concernent principalement les enfants avec des parents qui cherchent à les faire s’exprimer au maximum. L’objectif est de vérifier la vie menée par les enfants hors de la maison afin de s’enquérir de leur santé et bien-être, que ce soit de s’assurer que le repas du midi était équilibré ou que leur vie sociale à l’école se passe bien.
La convivialité exige un travail émotionnel qui incombe majoritairement aux mères
La commensalité n’équivaut pas à la convivialité. Autrement dit, manger ensemble en famille n’est pas forcément agréable pour toutes et tous, tout le temps. Maintenir la convivialité exige un « travail émotionnel » significatif de la part de chacun des convives. Par exemple, à table, une mère peut essayer d’être enjouée, aimante et calme pour provoquer chez les enfants le contentement ou le plaisir. Les pères, quant à eux, jouent un rôle majeur dans la création d’une ambiance d’amusement à table. Partie intégrante des repas en famille, l’humour peut constituer un facilitateur de conversation et dénouer des tensions.
L’étude « A table en famille » est disponible en intégralité ici
Découvrez les précédentes parutions collection « Alimentation et bien-être » :
1er livret : « Grand âge, Alzheimer et maladies apparentées », issu de la thèse de Virginie POUYET - Médaille d’argent du Ministère de l’Agriculture ;
2e livret : « Des légumes et des enfants », issu de la thèse de David MORIZET ;
3e livret : « Snacking, Grignotage…un impact de poids », issu de la thèse de Xavier ALLIROT;
4e livret : « Autisme, des enfants bien dans leur assiette », issu de la thèse d'Anne-Claude LUISIER ;
5e livret : « Le plaisir de manger sous chimiothérapie », issu de la thèse de Kenza DRAREN ;
6e livret : « Déjeuner au travail, une question de temps » , issu de la thèse de Camille MASSEY ;
7e livret : « Chirurgie bariatrique et goûts, ce qui change », issu de la thèse de Erika GUYOT.
8e livret : « Mieux comprendre les rejets alimentaires des jeunes enfants », issu de la thèse de Damien FOINANT.
A propos de l’Institut Lyfe (anciennement Institut Paul Bocuse)
L’Institut Lyfe est un établissement d’enseignement supérieur associatif reconnu par l’État, formant les professionnels des arts culinaires, de la restauration et de l’hôtellerie. Depuis 2008, le Centre de recherche développe un programme recherche pluridisciplinaire (Sciences sociales, sciences cognitives, Sciences de la nutrition) pour relever le défi d’une alimentation goûteuse, saine et durable pour tous, au travers de l’acquisition de nouvelles connaissances scientifiques et du développement de l’évaluation de solutions innovantes.
Contact :
Plus d’infos ici
Le concept de commensalité désigne le fait de manger ensemble, illustrant ainsi l’intrication courante chez l’humain des deux pratiques essentielles que sont l’acte de s’alimenter et la sociabilité. En France, la commensalité est souvent au cœur du quotidien des familles. Les repas rythment la vie de tous les jours, tout autant que la vie quotidienne les façonne en retour, et ils constituent un temps de partage important lors duquel peut se faire l’apprentissage des règles sociales. La commensalité quotidienne est aussi à envisager d’un point de vue sanitaire. Les repas de famille sont, en effet, souvent perçus comme un moment d’éducation au goût et à une alimentation saine et variée. Ils sont, en outre, régulièrement promus par les autorités de santé publique en matière de santé physique, mentale, de bien-être et de sociabilité.
Le casse-tête de l’organisation des repas
La préparation des repas relève souvent du casse-tête tant sont nombreux les paramètres à prendre en compte :
- Les contraintes temporelles : l’importance accordée aux repas de famille s’inscrit dans une considération plus large pour la bonne santé des enfants, dont l’un des facteurs essentiels est le sommeil. L’impératif de coucher les enfants à une heure régulière et pas trop tard détermine, en effet, la durée et la fin des repas de famille. Les engagements de chacun dans la vie sociale en dehors de la maison sont également pris en compte.
- L’impératif diététique : les repas doivent être équilibrés, différer des repas pris le midi à la cantine scolaire et varier avec les dîners des autres soirs de la semaine, mais aussi d’une semaine à l’autre. Certaines familles utilisent des stratégies d’anticipation, en décidant à l’avance du menu pour s’alléger des contraintes alimentaires au jour le jour et faciliter la participation des pères. D’autres, à l’inverse, préfèrent simplifier les menus, ce qui en réduit souvent la qualité diététique au prix notamment de l’exclusion de certains légumes, car trop longs à préparer.
- Les préférences individuelles et le respect des restrictions alimentaires des différents membres de la famille dictent aussi la production des repas, c’est un facteur qui peut très vite devenir source de stress. A noter que l’étude relève que la perception de la viande rouge a évolué, une grande partie des familles observées essayant d’en limiter sa consommation lors des dîners.
La préparation des repas : un fardeau pour les mères, un plaisir pour les pères
Toutes les mères interrogées dans le cadre de l’étude ont indiqué être en charge des questions alimentaires dans le foyer et exprimé des sentiments de contrainte, de lassitude, de stress ou de culpabilité. En effet, elles s’attèlent à trouver les menus pour la semaine en prenant en compte les impératifs de santé et les préférences individuelles de chacun, les courses à réaliser, et l’heure du repas. À cette charge mentale s’ajoutent des dimensions morales et émotionnelles, notamment la responsabilité de devoir bien nourrir la famille, afin d’être une « bonne » mère et de témoigner ainsi son amour maternel. Les pères interrogés, quant à eux, ont un rapport épicurien à la nourriture et à la cuisine. Ils vivent le temps de préparation des repas comme un temps de détente permettant de déconnecter du travail et de transitionner vers la vie domestique.
Une nécessité physiologique et un enjeu de santé
Le repas doit répondre au besoin physiologique fondamental et universel que constitue la consommation alimentaire. Or, une personne n’aura pas forcément faim en même temps qu’une autre. Manger ensemble implique cependant de synchroniser les rythmes alimentaires des différents membres de la famille, ce qui contrarie parfois les besoins individuels. Pour les enfants, le temps du repas est aussi synonyme de découvertes gustatives. Néanmoins, les familles étudiées ont des conceptions bien différentes concernant le processus d’acquisition du goût. Celles de la classe moyenne inférieure considèrent que les enfants apprendront à aimer des goûts diversifiés lorsqu’ils seront plus âgés, voire adultes. En revanche, les familles de classes moyenne haute et supérieure pensent que les enfants sont susceptibles d’être socialisés tôt à des goûts d’adultes estimés comme sains.
Un temps de retrouvailles primordial pour « faire famille »
Le temps passé à table est aussi un moment pour échanger, et c’est même l’un des piliers de la commensalité en France. Le repas est un temps important pour la cohésion de la famille dans la mesure où les conversations permettent de générer un sentiment d’appartenance, de s’impliquer dans la vie des uns et des autres, et de créer une représentation commune du monde. Des conversations qui concernent principalement les enfants avec des parents qui cherchent à les faire s’exprimer au maximum. L’objectif est de vérifier la vie menée par les enfants hors de la maison afin de s’enquérir de leur santé et bien-être, que ce soit de s’assurer que le repas du midi était équilibré ou que leur vie sociale à l’école se passe bien.
La convivialité exige un travail émotionnel qui incombe majoritairement aux mères
La commensalité n’équivaut pas à la convivialité. Autrement dit, manger ensemble en famille n’est pas forcément agréable pour toutes et tous, tout le temps. Maintenir la convivialité exige un « travail émotionnel » significatif de la part de chacun des convives. Par exemple, à table, une mère peut essayer d’être enjouée, aimante et calme pour provoquer chez les enfants le contentement ou le plaisir. Les pères, quant à eux, jouent un rôle majeur dans la création d’une ambiance d’amusement à table. Partie intégrante des repas en famille, l’humour peut constituer un facilitateur de conversation et dénouer des tensions.
L’étude « A table en famille » est disponible en intégralité ici
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1er livret : « Grand âge, Alzheimer et maladies apparentées », issu de la thèse de Virginie POUYET - Médaille d’argent du Ministère de l’Agriculture ;
2e livret : « Des légumes et des enfants », issu de la thèse de David MORIZET ;
3e livret : « Snacking, Grignotage…un impact de poids », issu de la thèse de Xavier ALLIROT;
4e livret : « Autisme, des enfants bien dans leur assiette », issu de la thèse d'Anne-Claude LUISIER ;
5e livret : « Le plaisir de manger sous chimiothérapie », issu de la thèse de Kenza DRAREN ;
6e livret : « Déjeuner au travail, une question de temps » , issu de la thèse de Camille MASSEY ;
7e livret : « Chirurgie bariatrique et goûts, ce qui change », issu de la thèse de Erika GUYOT.
8e livret : « Mieux comprendre les rejets alimentaires des jeunes enfants », issu de la thèse de Damien FOINANT.
A propos de l’Institut Lyfe (anciennement Institut Paul Bocuse)
L’Institut Lyfe est un établissement d’enseignement supérieur associatif reconnu par l’État, formant les professionnels des arts culinaires, de la restauration et de l’hôtellerie. Depuis 2008, le Centre de recherche développe un programme recherche pluridisciplinaire (Sciences sociales, sciences cognitives, Sciences de la nutrition) pour relever le défi d’une alimentation goûteuse, saine et durable pour tous, au travers de l’acquisition de nouvelles connaissances scientifiques et du développement de l’évaluation de solutions innovantes.
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