L’ancien dignitaire du régime syrien récemment condamné en France à 4 ans d’emprisonnement pour blanchiment en bande organisée de détournement de fonds publics syriens aurait fui en Syrie où il aurait été accueilli par son neveu le président Bachar Al Assad.
A la suite d’une plainte déposée en 2013 par l’ONG Sherpa, la justice a pu mettre en évidence que Rifaat Al Assad aurait, au moment de son prétendu exil de Syrie, bénéficié illégalement de ressources publiques syriennes savamment dissimulées par le biais d’un tissu de sociétés-écrans à travers Europe et dans des paradis fiscaux.
La Cour d’appel a confirmé en septembre dernier le jugement rendu en première instance par le tribunal judiciaire de Paris en juin 2020 et a ainsi condamné Rifaat Al-Assad à 4 ans de prison ferme et à la confiscation de ses biens situés en France.
Cette décision, qui intervenait opportunément au moment même de la création en France d’un mécanisme de restitutions des biens issus de la grande corruption transnationale aux populations victimes, donnait des raisons de penser que la France avait fait de la lutte contre l’impunité et la corruption l’une de ses priorités. La nouvelle de la fuite de Rifaat Al Assad en Syrie constitue un signal particulièrement alarmant concernant l’engagement de la France dans la lutte contre la corruption.
En effet, si l’ensemble des biens acquis illégalement en France ont été saisis, il n’en demeure pas moins que la justice française a également condamné celui que l’on surnomme le boucher de Hama à une peine d’emprisonnement. Dès lors nous nous interrogeons sur les modalités qui ont rendu possible sa fuite, laquelle constitue un échec de la France dans ses engagements internationaux en matière de lutte et de répression effective de la corruption.
Nous rappelons que la grande corruption fait de nombreuses victimes et qu’il est urgent que ces victimes de la corruption à l’étranger soient reconnues et indemnisées. Cela ne peut se concevoir que si les personnes condamnées ne peuvent échapper à leur responsabilité ainsi qu’à l’application de la peine prononcée contre elles. La France pouvait jusqu’à peu s’enorgueillir que ses tribunaux aient porté un coup à l’impunité d’un kleptocrate. Néanmoins la fuite possible d’un personnage politique condamné par la justice est un coup dramatique porté aux efforts de la France en matière de lutte contre la corruption transnationale. En outre, la fuite de Rifaat Al Assad en Syrie et son accueil par l’actuel président syrien démontre qu’il est urgent que les contours du dispositif de restitution des avoirs mis en place par la France prennent en compte le risque que les biens restitués retombent dans les circuits de la corruption. L’Etat doit faire preuve en la matière d’une vigilance totale.
Enfin, Rifaat Al-Assad, conserve encore la plus haute décoration honorifique française. Sherpa demande de nouveau au Président de la République, Monsieur Emmanuel Macron, de saisir le Grand Chancelier de l’Ordre de la Légion d’honneur d’une procédure tendant à ce que la Légion d’honneur lui soit retirée.
Laura Rousseau, Responsable du pôle Flux Financiers Illicites,
Chanez Mensous, Chargée de contentieux et plaidoyer – Flux Financiers Illicites,
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