#Municipales2020
Métropole de Lyon :
pourquoi David Kimelfeld peut encore y croire
Malmené dans les sondages, David Kimelfeld paraissait pourtant le mieux placé en début de campagne pour capitaliser sur l’aspiration majoritaire des électeurs à tourner la page Gérard Collomb. Il mise sur un réseau d’élus sortants sans pareil, et un projet mûrement construit, pour revenir dans la course durant le « money time ». Pendant une heure, il a accepté de répondre aux questions de L’Arrière-Cour pour le deuxième long format vidéo de notre série sur les élections métropolitaines des 15 et 22 mars prochains.
Il y a six mois encore, David Kimelfeld faisait figure d’incontournable. Aujourd’hui, il serait presque devenu l’infréquentable. « Il n’a pas d’espace politique », conclut froidement le candidat écologiste à la Métropole, Bruno Bernard, qui n’imagine pas pour l’instant s’allier avec lui. « Pas d’alliance avec des représentants de LREM, officiels ou officieux », prévient de son côté Renaud Payre, celui de la Gauche unie (PS, PC, PRG, Génération.s, Place publique). Maire du 4e arrondissement et président en poste de la Métropole, David Kimelfeld n’imagine pourtant aucune autre alliance qu’avec eux deux. Gérard Collomb a beau continuer à « tendre la main, même si nous commençons à avoir des crampes », comme le confie un de ses proches collaborateurs, son ancien dauphin ne la saisira pas. Il y a désormais « trop de lignes de fractures » entre eux. Mais la grande alliance qu’il imagine « du centre droit aux écologistes et à la gauche » peine à prendre forme.
Les premiers meetings avaient pourtant fait naître beaucoup d’espoir dans le camp Kimelfeld. L’apéro-meeting de l’école Émile-Cohl en octobre, trois jours après la désignation officielle de Gérard Collomb comme candidat officiel de LREM, avait impressionné en rassemblant un bon millier de personnes, et un aréopage impressionnant d’élus et de collaborateurs d’élus décidés à tourner la page Gérard Collomb. Les sondages qui se suivent et se ressemblent depuis ont un peu douché l’enthousiasme : Gérard Collomb et Bruno Bernard font la course en tête pour le scrutin métropolitain, tandis que lui se dispute la 3e place avec le candidat LR François-Noël Buffet.
Entretien à retrouver ici :
« Contrairement à Collomb, je ne suis pas fasciné par les entreprises, je les connais »
La tentation est grande de proclamer que la messe est dite et que la bataille finale se jouera entre les écologistes et Gérard Collomb. David Kimelfeld a pourtant encore quelques bonnes raisons d’y croire. Il n’a pas tout à fait tort de penser que les électeurs commencent à peine à s’intéresser réellement au scrutin, et que les dernières semaines de la campagne peuvent l’aider à combler son déficit de notoriété. « Il y a un concurrent qui est très connu, celui qui a passé toute sa vie à faire de la politique, Gérard Collomb. Je fais partie de ceux qui ont eu une carrière, diverse et variée » tacle-t-il, rappelant qu’il a commencé comme infirmier, avant de créer une entreprise de transport. Il fait donc le pari que la présentation prochaine de son programme fera la différence, car il est sans doute celui qui a consacré le plus de temps à la préparation de ses propositions, profitant pleinement de l’expertise des services de son administration. Il devrait faire la part belle aux questions sociales, et annonce notamment que toute nouvelle mesure devra faire l’objet avant son adoption d’une évaluation « de son impact sur les 10% les plus fragiles de l’agglomération ». Il mettra aussi en avant le développement économique de la métropole, rappelant ses états de service en la matière : « Contrairement à Collomb, je ne suis pas fasciné par les entreprises, je les connais ». Un discours qu’il aura l’occasion de marteler le 21 février, quand il tentera d’obtenir la résiliation du contrat « scandaleux » du Rhônexpress, la navette qui relie Lyon à son aéroport, et qui fait « peser tous les risques à la collectivité » (À écouter à 42’50 de l’entretien). Un vrai point de divergence avec Gérard Collomb qui propose une « médiation » pour ménager les intérêts de Vinci, opérateur du Rhônexpress.
« Le scénario du « 3e homme »
L’autre motif d’espoir réside pour lui dans le mode de scrutin. Pour la première fois, les électeurs de la métropole éliront directement leurs représentants dans cette instance, le même jour qu’ils éliront leurs conseils municipaux. Et il paraît bien hasardeux de s’aventurer au moindre pronostic sur l’effet que cela pourra avoir. Complexité supplémentaire, le mode de scrutin choisi pour la métropole est un scrutin à trois tours, sur le modèle de celui en vigueur pour l’élection des maires de Paris, Lyon et Marseille. La métropole a ainsi été découpée en 14 circonscriptions. Dans chacune d’elle, il y aura deux tours. Seules les listes qui obtiendront 10% au premier tour pourront se maintenir au 2e, pour lequel des alliances seront naturellement possibles. Celui qui arrivera en tête du 2e obtiendra d’office la moitié des représentants de la circonscription, l’autre moitié étant répartie à la proportionnelle. Pour être élu président de la Métropole, il ne faut donc pas forcément obtenir le meilleur score sur l’ensemble de la métropole, mais l’emporter dans suffisamment de circonscriptions. Et sans doute faire preuve d’une grande capacité à rassembler, si aucune majorité claire ne se dégage.
Or David Kimelfeld a de bonnes raisons de penser qu’il aurait des atouts à faire valoir dans cet exercice, et qu’il a des chances de l’emporter là où sa notoriété est la plus forte, dans la circonscription qui regroupe la Croix-Rousse et la presqu’île de Lyon. S’il parvient à battre Gérard Collomb dans le centre-ville de Lyon, tout redeviendra sans doute possible pour lui. D’autant que le candidat soutenu par son ancien mentor pour la mairie de Lyon, Yann Cucherat, semble lui très mal embarqué, et son échec enverrait forcément un message de perte d’influence du maire sortant. Si la ville de Lyon basculait chez les écologistes – une hypothèse qui prend chaque jour de l’épaisseur – mais qu’aucune majorité claire ne se dégageait à la métropole, peut-on imaginer que Gérard Collomb en prenne la présidence ? Cela promettrait une cohabitation houleuse, et pourrait inciter les élus à chercher une troisième voie… « Il faut gagner à Lyon-centre, obtenir le plus d’élus possibles dans le reste de la ville et ensuite on verra », conclut Jacques Boucaud, collaborateur de David Kimelfeld, qui rappelle que son candidat présente sans doute les têtes de listes les plus établies dans leurs territoires, et ce un peu partout dans l’agglomération. David Kimelfeld bénéficie en effet du soutien de beaucoup d’élus sortants, fatigués par l’autoritarisme de Gérard Collomb. Quel poids électoral auront-ils réellement ? En cas de victoire, il est d’usage de les valoriser. Mais la dynamique électorale a souvent balayé les notabilités les mieux établies. Cette dynamique était sans doute du côté de David Kimelfeld en début de campagne. Elle ne semble plus l’être. Il lui reste quelques semaines pour la retrouver.
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